Imaginez un monde où le recrutement se transforme en une comédie policière aux accents scandinaves. C’est ce que propose « Chasseurs de têtes », une production norvégienne diffusée sur Arte qui tente de bousculer les codes du petit écran. Adaptée du roman éponyme de Jo Nesbø, cette série plonge les téléspectateurs dans l’univers particulier du recrutement de haut niveau à Oslo.
Au cœur de l’intrigue, nous suivons les péripéties de Roger Brown, un homme prêt à tout pour se faire une place dans le monde compétitif des chasseurs de têtes. Mensonges, manipulations et situations inattendues s’entremêlent dans cette comédie noire qui ambitionne de révéler les dessous peu reluisants du recrutement de cadres supérieurs. « Chasseurs de têtes » se veut à la fois une satire du monde professionnel et un thriller, même si le mélange des genres ne fait pas toujours l’unanimité auprès des critiques.
La série, constituée de 6 épisodes est disponible en streaming gratuit sur Arte.tv jusqu’au 1/09/2025
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Un pitch qui sort des sentiers battus
« Chasseurs de têtes » nous transporte dans l’Oslo de 2002, où le jeune et ambitieux Roger Brown tente de se faire une place au soleil. Grâce à son bagou et à son art consommé du mensonge, il parvient à décrocher un poste de chasseur de têtes chez Alfa, un prestigieux cabinet de recrutement.
L’intrigue se corse rapidement lorsque Roger doit remplacer au pied levé le PDG de Njord Oil, récemment décédé. Pour dénicher la perle rare, notre anti-héros se rend à Londres où il rencontre Sander, un candidat potentiel. C’est également là-bas qu’il fait la connaissance de Diana, une jeune et séduisante commissaire d’exposition.
Désireux d’impressionner Diana et d’obtenir rapidement beaucoup d’argent, Roger se lance dans une entreprise pour le moins hasardeuse. Il entre en contact avec Ove, un petit malfrat amateur d’armes à feu, qu’il convainc de participer à un vol d’œuvre d’art. C’est à partir de ce moment que la série prend un tournant résolument humoristique et décalé.
Des personnages hauts en couleur
La force de « Chasseurs de têtes » réside indéniablement dans ses personnages atypiques et bien troussés. Roger Brown, interprété avec brio par Axel Boyum, est un personnage à la fois attachant et agaçant. Menteur invétéré et manipulateur hors pair, il devient paradoxalement touchant à mesure que ses mensonges le mettent dans des situations de plus en plus périlleuses.
Diana, campée par Ingrid Giæver, apporte une touche de normalité bienvenue dans cet univers loufoque. Commissaire d’exposition, elle semble être le seul personnage à évoluer de manière « normale » dans ce monde en décrépitude. Son histoire d’amour avec Roger ajoute une dimension romantique inattendue à la série.
N’oublions pas Ove, interprété par Mikkel Bratt Silset, qui incarne à merveille le petit truand amateur, plus doué pour jouer au bridge que pour commettre des braquages. Sa relation avec Roger, faite de méfiance et de complicité forcée, est l’une des sources principales de l’humour de la série.
Entre comédie et thriller : un équilibre délicat
« Chasseurs de têtes » tente de naviguer entre plusieurs genres, ce qui constitue à la fois sa force et sa faiblesse. D’un côté, on apprécie l’originalité de cette approche qui mêle comédie, thriller et satire sociale. De l’autre, on peut parfois se sentir désorienté par ces changements de ton.
La série démarre sur les chapeaux de roues avec une intrigue de facture plutôt classique, centrée sur le monde du recrutement et ses travers. Mais rapidement, elle glisse vers une comédie franchement loufoque, avec des chausse-trappes et des quiproquos à gogo. Cette évolution peut dérouter certains spectateurs qui s’attendaient à un thriller plus conventionnel.
Cependant, c’est justement ce mélange des genres qui fait le charme de « Chasseurs de têtes ». La série n’hésite pas à pousser ses situations à l’extrême, créant des scènes à la fois drôles et tendues. On rit des déboires de Roger tout en se demandant comment il va se sortir de situations de plus en plus périlleuses.
Une satire du monde du travail
Bien que la série s’éloigne rapidement du monde du recrutement pour plonger dans des intrigues plus rocambolesques, elle conserve un regard acerbe sur le monde du travail. « Chasseurs de têtes » dresse le portrait d’un univers professionnel où le paraître prime sur l’être, où les mensonges et les manipulations sont monnaie courante.
Roger Brown est l’incarnation parfaite de cette critique. Son succès initial repose entièrement sur un CV falsifié et sur sa capacité à mentir avec aplomb. La série pousse ce concept à l’extrême, transformant chaque interaction professionnelle en un jeu de dupes où la vérité n’a plus sa place.
Cette satire s’étend au-delà du seul personnage de Roger. Le cabinet Alfa, présenté comme le nec plus ultra du recrutement, apparaît finalement comme une structure creuse, plus préoccupée par les apparences que par la compétence réelle de ses recrues. C’est tout un système qui est ainsi remis en question, où la réussite semble davantage liée à la capacité à bluffer qu’aux véritables compétences.
Une esthétique soignée
Malgré ses aspects loufoques, « Chasseurs de têtes » ne néglige pas pour autant son esthétique. La réalisation de Geir Henning Hopland offre une belle vitrine à la ville d’Oslo, alternant entre les bureaux aseptisés des cabinets de recrutement et les rues animées de la capitale norvégienne.
Le soin apporté aux costumes mérite également d’être souligné. L’évolution vestimentaire de Roger, passant du costume italien sur mesure à des tenues de plus en plus débraillées à mesure que ses mensonges le rattrapent, est particulièrement bien pensée. C’est un exemple parfait de la façon dont la série utilise des éléments visuels pour souligner l’évolution psychologique de ses personnages.
Un bilan mitigé
« Chasseurs de têtes » divise. Certains spectateurs apprécieront son humour décalé et son regard acerbe sur le monde du travail. D’autres pourront être déroutés par ses changements de ton et son intrigue parfois alambiquée.
Ce qui est certain, c’est que cette adaptation du roman de Jo Nesbø ne manque pas d’audace. En choisissant de privilégier l’humour et l’absurde plutôt que le suspense pur, elle prend le risque de décevoir les amateurs de thrillers classiques. Mais elle offre en contrepartie une expérience télévisuelle rafraîchissante et originale.
La série pose également des questions intéressantes sur notre rapport au travail et au succès. Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour réussir ? Le mensonge et la manipulation sont-ils devenus des compétences professionnelles comme les autres ? Ces interrogations, bien que traitées sur un mode humoristique, ne manquent pas de pertinence dans notre société actuelle.
En définitive, « Chasseurs de têtes » est une œuvre atypique qui ne laissera personne indifférent. Qu’on l’apprécie ou non, on ne peut nier son originalité et sa volonté de bousculer les codes des séries policières traditionnelles. Dans un paysage télévisuel parfois trop formaté, cette audace mérite d’être saluée.
Alors, prêts à plonger dans l’univers déjanté du recrutement à la norvégienne ? « Chasseurs de têtes » vous attend sur Arte pour six épisodes de 45 minutes chacun. Une chose est sûre : vous ne regarderez plus jamais un entretien d’embauche de la même façon !